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De la malade imaginaire à la maladie invisible

Dernière mise à jour : 20 mai 2020

« Vous n’avez rien Madame. »

« Les analyses ne montrent rien. »

« Vous avez une tension et une fréquence cardiaque trop basse mais rien ne l’explique donc ce n’est pas grave, apprenez à vivre avec. »



«Vous êtes en pleine santé, Madame ! »

« Avez-vous déjà pensé à consulter un psychologue ?

Vous êtes certainement trop stressée. »


27 ans d’errance médicale.



Environ 15 ans durant lesquels ces phrases ont fini par s’ancrer profondément en mon esprit : « Tu n’as rien alors fais comme tout le monde, aller, pourquoi tu n’es jamais bien ? Pourtant même les psys disent que tu n’es pas malade alors hop, c’est dans ta tête, avance, continue ! »


Quand la maladie se cache…


- 26 avril 1991 à novembre 1992, 19 premiers mois de ma vie : coliques chaque nuit.


- Dès 19 mois : fini la nuit, départ pour la journée.


- 12 ans : Moi : « Je ne peux pas venir jouer j’ai trop mal au ventre », Amis : « Mais tu as TOUT LE TEMPS mal au ventre ! ».


- 19 ans départ du foyer familial : s’ajoute une fatigue intense et régulière mais on continue, les études et un métier avant tout.


- 20 ans : enfin un médecin me prend au sérieux ! Intolérances au gluten, produits laitiers, histamine, FODMAPs et j’en passe. Éviction d’un maximum d’aliments, mais peu d’améliorations. Suite des investigations.


- 22 ans : décès de maman mais en plein examens alors hop on ne se laisse pas abattre on continue, les études et un métier avant tout.


- 23 ans : début des insomnies, fatigabilité extrême aux efforts, chute de pression etc. Départ pour toutes sortes de « tests » médicamenteux car les analyses sont toujours juste « à la limite » de la norme. En gros je n’ai toujours « rien ».


- 24 ans : j’avais un rêve et je le réalise. Mes études réussies, j’ouvre mon propre jardin d’enfants (petite école). Je tiens le coup, je veux réussir. Mais j’annule de plus en plus de rendez-vous avec mes amis, je n’ose plus accepter tant je peux être bien un jour et mal 2 semaines ensuite. Je commence à avoir peur de moi-même, de mon corps en qui je n’arrive plus à avoir confiance. Je suis prise pour une hypocondriaque angoissée qui ne fait que se plaindre et qui a toujours quelque chose qui ne va pas. Et je me considère de plus en plus de cette manière également !


- 26 ans : suite à la lecture de mon dossier, le service des maladies rares me parle d’un syndrome possible en lien avec mes symptômes. Je ne me reconnais pas vraiment là-dedans donc je ne donne pas suite (« c’est sûrement vraiment dans ma tête »… jusqu’à la prochaine crise).


- 27 ans : mon corps dit STOP !

Nous étions le 30 novembre. Ce jour-là tout s’est arrêté. Ce jour-là tout a commencé.

Vendredi soir après une semaine et une journée difficile, je tente dans un dernier effort de me lever. Comment une action si bête et tellement courante pour une éducatrice de jeunes enfants peut-elle être si difficile ? Heureusement, les meubles m’aident, les bas de contention deviennent une bouée de sauvetage et le sourire des enfants des sources de force. Ce soir-là, j’y crois encore, je me lève donc une dernière fois pour me rendre à la chorale avec l’espoir que ce divertissement et la présence des amis apaiseraient mes douleurs et ma fatigue. Mais c’est trop tard, la corde a trop été tirée. À moitié paralysée du côté gauche, je ne peux plus articuler et à peine marcher. C’est en traînant les pieds et le trop faible poids de mon corps que je me rends aux urgences. Troisième visite en 3 ans pour des symptômes plus ou moins similaires mais cette fois-ci mon pouls est arrivé assez bas pour qu’on ne me renvoie pas à la maison après stabilisation. Je passe la nuit en observation, je réponds aux questions des médecins qui peinent à me croire. Hé oui, même en arrivant aux urgences avec des sandwichs et du risotto (pour maintenir ma pression à un niveau acceptable, j’ai besoin de manger régulièrement et salé), on me croit anorexique. Non, Monsieur, justement ! Je mange même plus que de raison parfois, mais je perds du poids encore et encore. Enfin, je suis entendue et hospitalisée pour une durée indéterminée.

Seule à la tête de ma petite école et en pleine période de fêtes, me voilà bloquée à devoir trouver des solutions de remplacement dans les plus brefs délais. Je travaille donc depuis l’hôpital pour coordonner ce qui peut l’être.


Arrivée en chambre, je reçois la visite du Dr House ;-)

Enfin, c’est comme cela que je l’ai surnommé lorsqu’il m’a dit : « D’habitude je ne rends pas visite aux patients, j’en laisse le soin à mes assistants mais j’aime les cas bizarres et je veux trouver ce que vous avez. »


Waouh ! Comment le prendre ? Génial, on va peut-être trouver une réponse !


Pendant une semaine, je suis devenue… passoire radioactive XD

Des trous partout et des passages dans toutes sortes de machines, trimbalée de haut en bas de l’hôpital, au moins tout était analysé.

Malheureusement, mes émotions ont également pris l’ascenseur. Par exemple, le matin : « Oui, vous avez cette anomalie, ce problème ». Mes larmes coulent de soulagement « Je ne suis pas folle et je vais être soignée ! ». Le soir, visite du médecin chef : « Non finalement, ce n’est pas cela qui crée vos symptômes ».


Et ainsi de suite jusqu'au dernier jour où j’ai eu droit au grand jeu: Dr. House et son équipe dont… la psy !

"Nous n’avons rien de totalement plausible, prenez ce médicament pour vos brûlures d’estomac et rentrez chez vous. Essayez d’avoir la vie la plus normale possible c’est bon pour le moral." Uh uh 😒


Joie, bonheur et liberté, je sors de cet hôpital. Je ne peux recommencer à travailler qu’à 50% et même ces quelques heures sont difficiles physiquement.


Bon, pour la suite, retour chez mon docteur « papa Ours » ;-) (celui et seul qui m’a toujours pris sous son aile et jamais laissé tomber) nous allons à nouveau chercher vers les maladies rares auprès du service d’un hôpital universitaire réputé en Suisse romande. Celui qui m’avait parlé d’un syndrome inconnu au bataillon.


Je suis convoquée par le médecin spécialiste pour un atelier de diagnostic avec d’autres personnes qui seraient également susceptibles d’être atteintes de cette maladie.

Peu convaincue, je fini par m’y rendre tout de même et j’en ressors quelques heures plus tard avec un diagnostic sans équivoque: je souffre d’une maladie génétique nommée «Syndrome d’Ehlers Danlos» type hypermobile.


C’est ainsi que de la malade imaginaire, je passe à la maladie invisible !


Croyez-moi, cela ne change pas grand-chose pour les autres.


Quand le gène se gêne


Malheureusement, le gène responsable n’a pas encore pu être isolé par les scientifiques. Il n’existe donc pas une analyse sanguine ou une imagerie capable de prouver l’atteinte de la personne. Cependant, des symptômes et manifestations physiques mis ensemble et objectivés par un médecin peuvent l’attester concrètement. Donc les bonnes nouvelles: je ne suis pas folle et je ne devrais pas en mourir prochainement. Les mauvaises nouvelles: il n’existe pas de traitement, la maladie n’est pas reconnue par les assurances invalidités et la grande majorité des médecins ne la connait pas.



D’apparence, je suis comme tout un chacun, deux jambes, deux bras, deux yeux, une bouche… en fait un être humain, une jeune femme ordinaire de presque 30 ans. J’aime l’escalade, la nature, la lecture, les jeux de sociétés, les animaux, le roller. J’étais éducatrice de l’enfance et je me suis reconvertie professionnellement. Je suis maintenant hypnothérapeute et magnétiseuse. J’ai des amis avec qui je vais au restaurant, me balader, partager des moments sympas, etc.




Voici l’emballage. Voilà ce que l’on distingue de l’extérieur.

Si l’on zoom un tant soit peu, juste sous la première couche, si l’on me côtoie sans réellement me connaître, on peut remarquer qu’il y a de longues périodes où les cernes sous mes yeux deviennent de plus en plus creuses, où je ne parle que très peu avec mes voisins et mon entourage, des moments plus ou moins longs où je ne pars plus marcher, je deviens peu agréable car j’évite l’éternelle question de politesse « ça va ? ». Car non, ça ne va pas… et il est très difficile pour moi de répondre le contraire maintenant. Car je l’ai fait pendant longtemps et durant ces années « oui, ça va », j’ai forcé mon corps à conserver cette façade malgré la tornade intérieure et il m’a stoppée ! Brusquement et violemment! Cependant, beaucoup de ces personnes qui me côtoient juste sur ce fil entre deux, ne sont pas prêts à voir ce qui est caché sous l’emballage. Je suis malade, oui, mais invisiblement malade. Pour eux, je suis donc toujours hypocondriaque, petite nature, angoissée et négative avec qui l’on n’a pas de plaisir à échanger plus loin que la question « ça va ? ».


Et il y a les exceptions, les amis, la famille proche, les personnes qui ont su voir la lumière à l’intérieur de moi quand la douleur et le désespoir me donnait une simple impression de vide sombre et froid. Ces personnes qui ont observé de loin et avec amour ma renaissance grâce aux soins énergétiques et à cette reconnexion spirituelle qui me manquait depuis tant d’année. Ces personnes qui continuent d’être présentes même lors de nouvelles crises, de nouveaux doutes et de nouvelles peurs qui malgré mon cheminement, reviennent parfois. Elles sont les observateurs et participants chaleureux de mes belles périodes où les méditations, les marches, le yoga et la sérénité prennent la place des inconforts.

Merci à elles !


Par ce texte, je souhaite faire connaître entre autre le syndrome d’Ehlers Danlos mais également sensibiliser les gens aux maladies « invisibles » afin d’apporter plus de compréhension, de douceur et d’acceptation dans un monde en mouvement.

Finalement que l’on soit malade ou non, ne nous fions pas aux apparences. Avant de se permettre de juger quelqu’un, demandons-nous si nous avons la capacité de prendre sa place avec son vécu, ses expériences et son corps. Ceci est bien sûr impossible. Nous ne pouvons pas apprécier tout le monde c’est sûr, mais nous pouvons nous respecter les uns les autres et faire preuve de compassion.

Pour terminer, je vais créer une liste non exhaustive des manifestations liées au SEDh que je ressens. Souvent, les personnes (médecins compris) qui ne connaissent pas la maladie ne prennent tout de même pas les gens diagnostiqués au sérieux pour plusieurs raisons : les symptômes peuvent être transitoires, variables en intensité, visibles ou non. De plus, les premières informations que l’on trouve si nous tapons le nom de la maladie sur un moteur de recherche évoquent le dysfonctionnement du tissu conjonctif donc une peau élastique et des articulations qui se blessent facilement. Certaines personnes sont effectivement très atteintes au niveau articulaire et musculaire. De ce fait, elles se retrouvent parfois en fauteuil roulant ou doivent être attentives à chaque micro-mouvement. Mais il y a aussi les personnes (dont je fais partie) qui souffrent en effet de problèmes musculaires et articulaires mais dans de plus faibles mesures. Cependant, le tissu conjonctif est présent en très grande quantité dans le corps, ce qui crée tout un tas d’autres difficultés auxquelles on ne penserait pas au premier abord. En effet, c'est le tissu qui "emballe" tous les organes, qui les maintient ensemble. Sans compter d’autres manifestations courantes du syndrome dont l’explication n’a pas encore été trouvée (à ma connaissance). Certains sites spécialisés citent plusieurs manifestations du SED (voire quasiment toutes pour le site du Pr. Claude Hamonet) mais répertoriées dans divers onglets et paragraphes, ce qui peut-être un peu laborieux à lire pour quelqu’un qui cherche l’essentiel.



Grâce à cette liste, j’espère donc pouvoir sensibiliser la population et parfois même l’entourage de personnes atteintes du SED avec des exemples concrets de ce que nous vivons.


Dans ce but, j’invite et encourage chaque personne atteinte du syndrome à commenter cet article et compléter la liste si elles le souhaitent.


Voici donc les manifestations que je ressens (pour rappel : atteinte du type hypermobile) :


- Malgré le type, mon hyperlaxité articulaire est moindre comparé à d’autres personnes mais je me blesse facilement par des « faux-mouvements »

- Très important chez moi : la DYSAUTONOMIE et ceci particulièrement en période de crise. C’est-à-dire des troubles dans tout ce que le corps devrait faire régulièrement et automatiquement, sans effort ni réflexion:

o Température corporelle perturbée (légère fièvre ou très basse) ce qui crée des frissons et symptômes grippaux ou qui ne s’adapte pas ou peu au milieu (froideur extrême des extrémités, grande frilosité mais chaleur difficile à supporter également)

o Pression sanguine bien trop basse (normal = 120/80, moi = 77/57 ou 80/48 en crise et 100/60 hors crise) ce qui crée une fatigue extrême qui peut empêcher le mouvement

o Fréquence cardiaque trop basse (bradycardie entre 35 et 45 en crise ou qui peut augmenter et descendre subitement en quelques secondes de 35 à 70) ce qui donne l’impression que le cœur s’arrête, que je ne peux plus respirer correctement, que je vais tomber (en cas extrême, l’impression qu’on va mourir ce qui mène parfois aux urgences)

o Gastroparésie et constipation (c’est-à-dire une digestion très lente car le péristaltisme ne se fait que très peu de manière autonome) ce qui crée des lourdeurs d’estomac avec de la fatigue intense, des ballonnements, des douleurs, des indigestions, etc. et ceci tous les jours crise ou pas crise

o Dyspnée, apnées du sommeil, c’est-à-dire des difficultés respiratoires, des « pauses » involontaires dans la respiration et une sensation de manquer d’air, une oppression de la poitrine et un diaphragme serré

- Pseudo-paralysies, c’est-à-dire des muscles voire des portions de corps entier qui deviennent presque paralysés et/ou endormis

- Seuil à la douleur trop bas donc on ressent très vite la douleur

- Migraines avec aura

- Douleurs musculaires mais surtout faiblesse extrême musculaire et générale, engourdissements

- Troubles visuels (petites taches qui passent régulièrement devant les yeux)

- Fatigue extrême et fatigabilité rapide à l’effort (certains jours 10 min à cuisiner ou ranger la lessive deviennent totalement épuisant)

- Gastrite chronique et RGO (reflux gastro-oesophagien) ce qui crée de violentes brûlures, des insomnies et comme pour tout, accentue la fatigue

- Inflammations chroniques des intestins (ventre gonflé, douleur, lourdeur, hyperperméabilité, etc.) ce qui empêche la bonne absorption des nutriments essentiels à la vie et laisse passer les toxines

- Bleus (hématomes) spontanés ou rapides

- Inflammations diverses dans le corps

- Œdèmes des jambes (rétention d’eau dans les jambes qui de ce fait, enflent)

- Atteintes ORL fréquentes voire chroniques

- Période de « déprime » ou dépression dans les grosses crises

- Hypersensibilité sensitive (particulièrement odeur et son pour moi) et émotionnelle


Tous ces symptômes peuvent être plus ou moins intenses et plus ou moins chroniques. C’est-à-dire qu’il peut m’arriver en bonne période d’enchaîner plusieurs activités, certaines fois de marcher plusieurs heures ou autre alors que le lendemain pourrait être un mauvais jour durant lequel faire le ménage serait presque mission impossible. Et en cas de crise l’intensité des symptômes peut être très forte ce qui me force à ne rien faire pendant plusieurs jours, semaines ou même mois.


Ce qui me vient en aide en général est la méditation, les soins énergétiques (que je donne ou que je reçois), l’hypnose, etc. Finalement, mon métier m’aide dans ma maladie et je suis très heureuse de pouvoir accompagner d’autres personnes car les séances deviennent des échanges.


Je termine ici mon article et mon partage.


N’hésitez pas à commenter que ce soit pour des avis, des questions ou des compléments, ce serait un plaisir de vous lire !


Plein de douceur à vous.

Du cœur,

Anouck

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